mardi 13 décembre 2011

La galerie Vivienne au coeur de Paris

Source: galerie Vivienne


La galerie Vivienne est l'un des témoins architecturaux les mieux conservés et les plus vivants de Paris de la première moitié du XIXème siècle. Son histoire, de près de deux siècles aujourd'hui, est riche en rebondissements et en anecdotes.

Naissance et déclin de la Galerie Vivienne au XIXème siècle
C'est en 1823 que Maître Marchoux, notaire habitant le 6 rue Vivienne, confie à François-Jean Delannoy, architecte 1er Grand Prix de Rome, la réalisation d'une vaste galerie commerçante joignant par un angle droit la rue Vivienne à la rue des Petits Champs. L'idée était d'assurer une liaison avec les jardins du Palais-Royal et leurs galeries, alors très animés.
Sa démarche, celle d'un visionnaire mais aussi d'un spéculateur avisé, s'inscrit dans le nouveau type d'aménagement urbain que sont alors les galeries et passages couverts dans Paris. En offrant confort et distractions sous leurs verrières, à l'abri du vacarme et de la boue de la rue, ils seront un véritable phénomène de mode, et une attraction pour les étrangers qui leur réservaient souvent leur première visite dans la capitale. Ils contribueront à l'invention de la figure du "flâneur" au XIXème siècle.
En 1826 la galerie, d'abord appelée Marchoux, puis bientôt galerie Vivienne, est inaugurée.
Avec sa décoration raffinée, son sol en mosaïques, ses soixante-dix boutiques de mode et de nouveautés, ses cafés, sa librairie, ses marchands d'estampes, elle remporte un succès considérable, que sa rivale, la galerie Colbert, qui ouvrira en 1827, ne réussira jamais à concurrencer.
Assez vite, pourtant la fréquentation des lieux diminue, en particulier du fait de réglementations sévères qui visent à interdire jeux et prostitution au Palais-Royal, entraînant une baisse d'activité. Sous le Second Empire, on peut dire qu'elle est en plein déclin avant de tomber dans l'oubli vers le milieu du siècle.
Hermance Marchoux, fille et héritière du notaire promoteur, à qui l'on doit les caryatides finement sculptées de l'entrée de la galerie, rue des Petits-Champs, lègue en 1859 tous ses biens, dont la galerie Vivienne, à l'Institut de France, Académie des Beaux-Arts, aujourd'hui encore son propriétaire. Elle ajoute une clause à ce legs fait "afin que les revenus de cette galerie fournissent annuellement à chaque peintre et sculpteur sortant de Rome, un prix de 4000 et 3000 francs".

Curiosités et événements dans la galerie Vivienne au XIXème siècle
- En 1832, dans la "panoramanie" qui règne alors à Paris, soulignée par Balzac dans le père Goriot, s'ouvre galerie Vivienne un Cosmorama. Cette sorte d'ancêtre de la Géode, à la fois source de distraction et d'instruction, offre au public, par d'ingénieux systèmes d'illusion sur d'immenses toiles peintes, une représentation mobile du mouvement des astres.
- En 1830, quelques jours après la révolution de Juillet, Berlioz sorti dans les rues de Paris, se trouve mêlé à une foule emplissant les galeries Colbert et Vivienne qui entonne spontanément sa Marseillaise. Il écrit dans ses Mémoires: "Il faut se figurer que la galerie qui aboutissait à la rue Vivienne était pleine, que celle qui donne dans la rue Neuve des Petits-Champs était pleine, que la rotonde du milieu était pleine, que ces quatre à cinq mille voix étaient entassées dans un lieu sonore fermé à droite et à gauche (...) en haut par des vitraux, en bas par des dalles retentissantes (...), et l'on imaginera peut-être quel fut l'effet de ce foudroyant refrain... Pour moi, sans métaphore, je tombai à terre, et notre petite troupe, épouvantée de l'explosion, fut frappée d'un mutisme absolu, comme les oiseaux après un éclat de tonnerre."
- En 1883 et 1884 "Les Incohérents", artistes et écrivains anticonformistes exposent dans un local de la galerie Vivienne.
- En 1888 Henri Signoret ouvre au 61 de la galerie Vivienne son petit théâtre, le premier théâtre de marionnettes littéraires. On y donnera avec succès Shakespeare comme les pièces du poète Maurice Bouchor qui écrit pour les petits personnages "Noël ou le mystère de la nativité". Le théâtre fermera en 1894.


La traversée du XXème siècle
Au début du XXème siècle la démolition pure et simple de la galerie, laissée à l'abandon, est envisagée.
En 1961, des travaux de réparation entraînent l'effondrement de la coupole.
Ce n'est qu'en 1974, alors que se manifeste un regain d'intérêt pour l'architecture du XIXème siècle, que la galerie Vivienne est inscrite à l'Inventaire des Monuments Historiques, pour être enfin restaurée.
Jamais complètement délaissée, elle a toujours attiré et parfois retenu les artistes, les écrivains, les créateurs, sensibles à son riche passé et à son parfum balzacien.
Colette fréquenta la librairie Petit-Siroux, comme, plus près de nous, l'écrivain Hervé Guibert aimait flâner dans la galerie.
Kenzo y fit son premier défilé en 1970. Un peu plus tard, un salon de thé, des boutiques de mode et de décoration commencent à investir la galerie qui retrouve peu à peu son lustre et son animation d'autrefois.
Elle devient un lieu "branché", ce qu'elle fut, somme toute, à l'origine. L'arrivée de Jean-Paul Gaultier en 1986 la consacre définitivement comme haut lieu de la mode parisienne.
Les touristes, parfois plus curieux que les Parisiens, sont de plus en plus nombreux à parcourir aujourd'hui cette galerie qui perpétue plus que d'autres le charme des passages couverts du XIXème siècle. L'histoire se répète, la galerie Colbert est aujourd'hui une "belle endormie", quand la galerie Vivienne continue à faire vivre l'héritage du passé.

Galerie Vivienne
Entrée par la rue des Petits-Champs
Caryatides sculptées par Hermance Marchoux


Galerie Vivienne
Entrée par la rue Vivienne

Le sol est signé par le mosaïste de l'Opéra Garnier,
Giandomenico Facchina

Galerie Vivienne
vers la rue Vivienne

Mosaïque de G. Facchina

Mosaïque de G. Facchina

Mosaïque de G. Facchina

Galerie Vivienne
vers la rue des Petits-Champs

Mosaïque de G. Facchina

Galerie Vivienne
entrée par la rue de la Banque

... et quelques photos supplémentaires sous forme de vidéo:

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