lundi 19 décembre 2011

Artémisia d'Alexandra Lapierre

Artémisia est un roman historique d'Alexandra Lapierre paru en 1998. Il nous présente la vie d'Artémisia Gentileschi, femme peintre du XVIIe siècle.



Le roman début par un épisode difficile: à 6 ans, Artémisia assiste sur les épaules de son père Orazio Gentileschi à l’exécution de Béatrice Cenci, jeune fille parricide violée par son père. On ne doute pas du fait que cela forge un caractère...

A 17 ans, alors que le Caravage vient de mourir sur une plage au nord de Rome, Artémisia est amoureuse d'un jeune romain mais son père refuse de la marier. Elle s'investit alors dans sa première oeuvre Suzanne et les vieillards.
C'est à l'occasion de la visite du chantier d'une fresque du palais du pape Paul V Borghese,
qu'Artémisia rencontre les collaborateurs de son père, dont son futur agresseur Agostino Tassi.
Artémisia a le sentiment d'un malheur à venir mais son père refuse de la marier, il ne peut se séparer d'elle.
Quelques mois plus tard, Agostino Tassi étant devenu le professeur de perspective d'Artémisia, il profite de l'intimité d'une leçon pour violer la jeune fille. Etonnament, elle continue alors à entretenir des relations intimes avec lui, croyant obtenir de lui un mariage pour laver sa honte... mais Tassi est déjà marié.
Orazio, mis au fait de cette agression, porte plainte et en novembre 1612, Agostino Tassi est condamné à choisir entre cinq ans de galère ou l'exil de Rome, mais le lendemain de ce jugement, la sentence est reformulée et il est simplement condamné à rester hors de Rome pendant cinq ans.
Bien faible condamnation au regard de son acte! Celle-ci sera d'ailleurs annihilée en 1613 par les Borghese.

En 1612, Orazio parvient à marier Artémisia avec un beau florentin, Pierantonio Stiattesi.
Celui-ci fait découvrir à Artémisia, les raffinements de Florence.
Artémisia s'intègre dans le milieu artistique florentin. Incarné par la famille Médicis, ce milieu se révèle moins concurrentiel que celui de Rome et plus favorable à l'émulation entre artistes.

A Florence, elle est parrainée par Michelangelo Buonarroti, petit-neveu de Michel-Ange.
En mars 1615, différents personnages de Florence se retrouvent à son domicile. Ainsi le grand-duc Cosme II de MédicisGalilée, le peintre Cristofano Allori et Michelangelo buonarroti découvrent Judith décapitant Holopherne. Cosme II de Médicis lui passe commande de multiples oeuvres et Artémisia démarre alors une carrière prodigieuse.

Blessée dans sa féminité par Agostino Tassi, elle sera aussi blessée dans sa maternité: ces trois premiers enfants décèdent en bas-âge, seul survit son quatrième enfant de Stiattesi, Prudenzia.

En 1621, Artémisia perd ses appuis avec la disparition de Cosme II de Médicis et du peintre Cristofano Allori, elle s'installe alors à Rome.

Dans un climat politique et religieux tendu (guerre de trente ans), Orazio Gentileschi quitte l'Italie.
Le prince Allemand Ferdinand II souhaite alors créer le Saint Empire: les protestants sont persécutés dans bon nombre de pays européens.
En France, « Louis XIII et Richelieu (...) abattaient d'une main les huguenots du royaume, tandis que de l'autre, ils tentaient de s'allier avec les nations schismatiques. Notamment avec l'Angleterre. Pour preuve de sa bonne foi, la France lui offrait l'une de ses filles - une reine très catholique... », Henriette-Marie.

Ce climat influence, de fait, les choix des différents gouvernements européens, y compris dans le domaine artistique. Alexandra Lapierre nous donne ici un exemple précis:
« Nul n'ignorait dans les cours de Madrid et de Londres pour quelle raison Richelieu retirerait bientôt à Rubens (...) la seconde partie de la grande commande que lui avait passée la reine mère pour son palais du Luxembourg.
Parce que Rubens travaillait pour l'Espagne! Parce que Rubens, venu installer à Paris ses tableaux à la gloire de Marie de Médicis, avait su rassembler autour de lui tous les partisans de la faction espagnole, et intriguer en faveur de la reine Anne d'Autriche contre Richelieu, contribuant à la division de la France en deux camps. »

En 1624, Orazio Gentileschi s'installe quelques mois au Louvre dans les appartements de Marie de Médicis cependant la concurrence avec Rubens et Giovanni Baglione est vive et il finit par gagner l'Angleterre convaincu par le duc de Buckingham qui fit une intervention remarquée en France:
« Favori du roi d'Angleterre, le duc de Buckingham venait chercher Henriette-Marie, fille cadette de Marie de Médicis, que Charles Ier avait épousée par procuration. Avant d'escorter la jeune reine dans son île, le sémillant duc allait trouver le moyen d'éblouir la Cour, de s'éprendre d'Anne d'Autriche et de se faire offrir quelques toiles par la France.
Richelieu refusa cependant de lui céder La Joconde et cette rebuffade mit Buckingham de méchante humeur.  »

Pendant ces quelques années, Artémisia continue son oeuvre et devient la maîtresse de l'ambassadeur d'Espagne auprès du Saint-Siège, le père de son cinquième enfant, Francesca.
En 1625, chez le cardinal Maurice de Savoie à Rome, elle rencontre Nicholas Lanier, maître de musique du roi d'Angleterre Charles Ier et son agent sur le marché de l'art italien. Artémisia et Nicholas sont amants quelques semaines.
A son retour contraint en Angleterre, il met en musique Hero and Leander, une plainte d'amants désunis.



Quelques mois plus tard, à Venise, Artémisia retrouve Nicholas Lanier pour une mission qui consiste à acheter pour le compte du roi d'Angleterre les toiles de la collection du duc de Mantoue, forcé de vendre ses oeuvres pour combler ses dettes.
La transaction s'avère compliquée, tant par la résistance du peuple de Mantoue qui souhaite conserver ces oeuvres que par le maigre budget artistique de Charles Ier. Celui-ci doit choisir entre le financement du siège de La Rochelle et son goût pour l'art. Il choisit l'art et son peuple lui fera payer durement ce choix.
Bien qu'Artémisia ait enfin rencontré l'Amour avec Nicholas Lanier, elle sent qu'un exil en Angleterre ne lui permettra plus de se dédier à son art. Elle se sépare de son amant et part à Naples avec ses filles pour  y installer un atelier.

En 1638, Orazio Gentileschi lui demande de jouer de son influence pour rapprocher Marie de Médicis (exilée dans les Flandres par son fils Louis XIII, suite à la journée des Dupes) et Charles Ier, son gendre.
Artémisia accompagne Marie de Médicis en Angleterre et rejoint Orazio au château de Greenwich
où celui-ci effectue sa dernière oeuvre qu'elle termine, son père disparaissant avant l'achèvement de l'oeuvre.

Elle rentre à Naples pour continuer ses activités artistiques et disparaît à l'âge de soixante ans.

Les thèmes abordés dans cet ouvrage sont nombreux: la difficulté de la création artistique au XVIIe siècle, le mécénat , les jeux d'influence et la corruption judiciaire, les relations d'un père et sa fille unis dans une même passion et pourtant rivaux, la rivalité entre artistes, l'importance de l'opinion publique, les différences culturelles et sociales entre les quatre villes italiennes mentionnées (Rome, Florence,Venise et Naples), le fonctionnement d'un atelier de peinture en Italie au XVIIe siècle, l'influence de la politique dans l'art, ...

Autoportrait en allégorie de la peinture
Artémisia Gentileschi
environ 1630
The Royal Collection
Kensington Palace
Londres

Poche: 669 pages
Editeur : Pocket
Date de parution: 1998
ISBN: 978-2266203302


A noter: exposition Artemisia Gentileschi au musée Maillol (Paris) du 14 mars au 15 juillet 2012


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